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tableau historique

tableau des 16 paradoxes
avant :
un démon à CIVAUX
suite : 
une baie à HEDINGHAM

 bandes lombardes à
TOURNUS








Pour aller aux autres exemples d'art roman analysés :

    un démon sculpté sur un chapiteau de CIVAUX
    la baie en plein cintre au château de HEDINGHAM
    le porche "à entonnoir" d'AULNAY
    le chevet de N.D. du Port à CLERMONT-FERRAND

   le tableau qui résume l'évolution de la musique et de l'architecture pendant le moyen-âge
   les généralités sur les effets paradoxaux que l'on trouve dans l'art roman
 
 

Pour charger l'image de l'exemple analysé :   le décor en bandes lombardes de l'Église abbatiale Saint-Philibert de TOURNUS en Bourgogne (France) - tout début du 11ème siècle  (s'ouvre en principe dans une autre fenêtre)

Source de l'image utilisée :
Photo "de Miré" reproduite d'après l'ouvrage "L'architecture en Europe - Le Préroman" - Editions Hachette - 1968
 

Ce décor à bandes verticales en relief, dites "bandes lombardes", est apparu dans les premières constructions méridionales de style roman, et il s'est ensuite répandu jusqu'en Allemagne.
À Tournus, qui est l'un des édifices majeurs des débuts du roman (son architecture intérieure est spécialement intéressante), ces bandes lombardes accompagnées comme souvent par des motifs "en dents d'engrenage", forment le thème principal de son architecture extérieure.
 


Le  1er paradoxe : fermé / ouvert

La peau du bâtiment est trouée par les creux laissés entre les bandes. Dans ces creux qui ouvrent la paroi apparaît un mur complètement aveugle -- fermé donc -- seulement percé de quelques rares fentes verticales.
La paroi est ouverte / fermée sans que l'on puisse dire où elle est fermée et où elle est ouverte, puisque ces deux effets apparaissent au même endroit : c'est une expression synthétique du paradoxe.

expression synthétique du paradoxe ouvert / fermé :
les percements de la façade ouvrent sur un mur aveugle, donc fermé

La surface extérieure de la paroi peut se lire en la suivant des yeux sans rencontrer d'obstacle, en suivant la surface des bandes et les surfaces horizontales qui les relient : le parcours de cette lecture est ouvert.
Chaque surface laissée en creux est par contre cernée par un parcours qui se referme sur lui-même : ce parcours est fermé.
Il y a un autre effet analytique que l'on peut lire, cette fois en restant sur le cerne qui enclos chaque surface en creux : verticalement son trajet est libre sur une grande longueur (ouvert donc), tandis qu'horizontalement, dans la partie en dents d'engrenage, partout il bute sur des impasses et doit rebrousser chemin (fermé donc à chacune des extrémités des dents).

expressions analytiques du paradoxe ouvert / fermé :
croquis de gauche : la peau extérieure peut se parcourir sans interruption en tous sens, tandis que le fond de chaque arcode est formé d'une cellule fermée, close sur elle-même
croquis de droite : le bord vertical de chaque arcade forme un trajet ininterrompu (ouvert), tandis que les dents d'engrenage forment un trajet qui butte sans arrêt sur une extrémité et doit alors rebrousser chemin





Le 2ème paradoxe : ça se suit sans se suivre

L'ensemble de la surface est faite d'un même matériau (des pierres irrégulières aux joints fortement marqués), et on peut suivre ce motif de la surface sans interruption. Pourtant la surface ne se poursuit pas à l'endroit des dénivelés des bandes, puisque à cet endroit elle se dérobe en creux : la surface se poursuit et ne se poursuit pas (effet synthétique).

expression synthétique du paradoxe ça se suit sans se suivre :
l'appareillage en pierres se poursuit uniformément et sans interruption sur toute la surface, y compris lorsqu'il traverse les arcades,
mais à cette traversée la surface se dérobe en creux et la peau extérieure s'interromp

Les motifs des dents se suivent horizontalement d'un creux à l'autre : ils forment une frise continue.
Mais ils ne se suivent pas vraiment puisque cette frise s'interrompt à chacune des bandes verticales.
C'est là un effet analytique, puisque l'on peut différencier clairement ce qui se suit et là où ça ne se suit pas.
Mais ce motif de dents intervient aussi dans un effet de type synthétique, puisqu'il introduit une lecture horizontale dans un motif de bandes et de creux qui se lisent verticalement. On ne sait pas décider dans quel sens lire la façade, et ce qui se suit dans un sens de lecture ne se suit pas dans l'autre.

 expression analytique du paradoxe ça se suit sans se suivre :
les dents d'engrenage se suivent en frise horizontale, mais cette frise s'interromp à chaque intervalle entre arcades

expression synthétique du paradoxe ça se suit sans se suivre :
deux lectures contradictoires sont suggérées, la lecture par bandes verticales, et la lecture par frises horizontales,
or les dents d'engrenage ne se suivent pas dans le même ordre dans les deux cas





Le 3ème paradoxe : homogène / hétérogène

L'ensemble de la surface est constitué d'un même matériau qui l'homogénéise, et dans cette surface homogène en pierre se creusent des défoncés qui y créent des hétérogénéités (expression synthétique).

expression synthétique du paradoxe homogène / hétérogène :
la même texture de matériau se poursuit de façon homogène sur toute la surface, mais dans cette surface des défoncés créent de l'hétérogénéité

La séparation des deux plans de la paroi est faite par un dénivelé dont la profondeur est partout régulière (homogénéité), mais le trajet de ce dénivelé est parfois rectiligne et rapide (les bords verticaux des bandes), parfois arrondis et lents à suivre du regard (les arrondis des dents d'engrenage), parfois continus (les bords verticaux et les arrondis) et parfois interrompus (les sommets des dents qui font rebrousser le trajet du contour). Homogénéité de la séparation des deux surfaces dans le sens de l'épaisseur, hétérogénéité dans l'autre sens, c'est une expression analytique du paradoxe.

expression analytique du paradoxe homogène / hétérogène :
le dénivelé entre les deux surface est d'épaisseur homogène, mais son parcours propose des formes très hétérogènes d'un endroit à l'autre
(de longues verticales régulières, des arrondis réguliers, de brusques rebroussements)





Le 4ème paradoxe : rassembler / séparer

La face la plus externe de la paroi recouvre en continu toute la surface, elle la rassemble dans un même matériau uniforme. Et ce faisant elle découpe des surfaces en creux qu'elle sépare l'une de l'autre (expression synthétique). Mais ces empreintes en creux nettement séparées l'une de l'autre se rassemblent dans notre perception par la similitude de leur forme : elles se rassemblent en un ensemble, celui des creux découpés dans la surface (expression là aussi synthétique).

expression synthétique du paradoxe rassembler / séparer :
la peau externe rassemble tout le bâtiment dans une même enveloppe, mais ce faisant elle sépare l'une de l'autre des arcades laissées en creux.

A leur tour, grace à leur similitude de forme, ces arcades séparées se lisent comme formant un ensemble, donc regroupées ensemble

La forme en arrondi d'une dent est par elle-même une forme qui rassemble puisque qu'elle cerne une surface. Dans le cas de cette frise, l'arrondi d'une dent sépare un morceau du grand creux dans le même temps où il rassemble ce morceau en unité distincte (expression synthétique).

autre expression synthétique du paradoxe rassembler / séparer :
la forme en arroni d'une dent cerne, donc rassemble une portion de surface, et ce faisant elle la sépare du reste de l'arcade

Tous ces "dessous de dent" sont à la fois rassemblés en continu avec le reste du creux puisqu'il n'y a pas de limite qui les en sépare, et séparés dans des alvéoles nettement distinctes (expression analytique).
Toutes les dents d'engrenage sont rassemblées en frise continue qui sont séparées en morceaux distincts par les bandes verticales (même effet analytique que pour le paradoxe "ça se suit sans se suivre").

expression analytique du paradoxe rassembler / séparer :
tous les creux cernés par les dents sont inclus dans le grand creux d'une arcade, mais ils sont aussi très nettement séparés les uns des autres

autre expression analytique du paradoxe rassembler / séparer :
les dents d'engrenage se rassemblent visuellement en une longue frise horizontale continue,
mais elles sont aussi séparées sur des alvéoles bien distinctes l'une de l'autre


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suite :    une baie cintrée à HEDINGHAM

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