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prélude initiatique

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passer directement aux croquis explicatifs de cet exemple (with translation and a special page for English readers)

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[Version de ce texte avec images incorporées pour l'impression papier.]

Modèle du lien qui permet d'afficher la gravure dans le cadre de droite, en taille réduite : petite  ou en grande taille :grande
Sauf exceptions mentionnées, les liens soulignés en couleur ouvrent un texte ou une image dans le cadre de droite. Notez qu'un clic droit sur la souris permet de les ouvrir dans une fenêtre séparée, mais qui sera chaque fois différente.
Souvenez vous que le texte sur la Vénus de Lespugue sert d'introduction pour expliquer les principales notions.Il est fortement conseillé de commencer par elle. Vous avez un lien vers cette analyse en haut à gauche de cette page. Vous pouvez éventuellement faire un clic droit sur ce lien pour l'ouvrir dans une autre fenêtre, ce qui vous permettra d'y accéder à tout moment sans fermer la présente fenêtre.




Gravures sur roc au Val Camonica

Le Val Camonica dans les Alpes italiennes est un important ensemble de sites préhistoriques s'étalant sur une longue période, et dont le style évolue bien entendu selon les époques. La gravure que l'on va analyser forme la partie supérieure d'une vaste gravure rupestre qui se trouve à Naquane.

petite  grande  L'image utilisée  est une reproduction partielle du graphisme qui en est donné dans l'ouvrage d'Emmanuel Anati aux Éditions Larousse : "L'art rupestre dans le monde - L'imaginaire de la préhistoire" [1997]. Une représentation photographique du rocher lui-même se trouve dans un autre ouvrage d'Anati, paru cette fois chez Albin Michel : "Les origines de l'art et la formation de l'esprit humain" [1989].
Ces gravures appartiendraient à la période néolithique où l'économie combinait la chasse et le début de l'agriculture. On peut situer entre 5 500 et 3 300 avant J.C. la date d'exécution de ces gravures, c'est-à-dire très nettement après la date de réalisation de la Vénus de Lespugue de l'époque gravettienne, époque antérieure à l'invention de l'agriculture et antérieure aussi à l'invention de la chasse à l'arc.

[Pour un accès rapide aux analyses, l'explication suivante peut être sautée en utilisant ce lien qui mène au premier effet plastique analysé]


Si vous souhaitez mieux repérer l'étape que représente ces gravures dans l'histoire de l'art, vous pouvez utiliser le lien qui mène au découpage des étapes de la période néolithique dans la filière occidentale, sachant que par convention cette étape est numérotée B0-23.
Par rapport à l'étape de la Vénus de Lespugue analysée dans le texte précédent, il est utile de savoir que :
    - les 4 paradoxes d'état se sont décalés d'un cran : celui qui était le premier (le paradoxe homogène / hétérogène) a disparu, celui qui était en second (rassembler / séparer) est devenu le premier, et en quatrième position nous allons voir un nouveau paradoxe : le lié / indépendant.
    - les 2 paradoxes de transformation sont maintenant 3. Ils sont complètement renouvelés, mais, ce qui nous simplifiera l'analyse, il se trouve qu'ils font tous partie des paradoxes d'état : seul le paradoxe continu / coupé ne se retrouve pas dans les paradoxes de transformation.
Si vous souhaitez examiner plus en détail l'évolution des paradoxes entre l'étape numérotée B0-13 de la Vénus de Lespugue, et celle numérotée B0-23 que l'on analyse maintenant, vous pouvez consulter le tableau récapitulatif [il s'ouvre dans une fenêtre qui lui est réservée] . A son examen vous constaterez qu'entre ces deux étapes se situe l'étape cruciale B0-20, dite "d'interphase", qui correspond au Magdanénien moyen (Altamira, Niaux, Rouffignac, etc.) qui voit le décalage d'un cran du déroulement des paradoxes d'état, et qui est la dernière étape à ne comporter que deux paradoxes de transformation.




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Le premier effet paradoxal est devenu le "rassembler / séparer"


La façon de schématiser les bonhommes

petite  grande  La Vénus de Lespugue était indiscutablement de sexe féminin. Bien que schématiques, ce sont pour la plupart des bonhommes de sexe indiscutablement masculin auxquels cette fois nous avons affaire. 
Si on en isole un, on voit que sa silhouette est faite de deux traits en U séparés et qui se séparent, d'autant plus qu'ils se dirigent vers des directions complètement opposées, mais qui sont rassemblés dans un même trait ininterrompu.

Nota :
Pour plus de fluidité et de simplicité, sauf pour l'analyse de la Vénus de Lespugue, dans le cadre de ce cycle de "prélude initiatique" seuls quelques aspects de chaque paradoxe sont expliqués accompagnés de croquis dans la fenêtre de droite.
Cependant, après la présentation de ces effets, d'autres effets sont présentés par des croquis et une courte analyse dans le cadre de la  "bibliothèque" des effets paradoxaux. Par commodité, le lien ouvre cette bibliothèque directement sur l'exemple concerné, mais en remontant en tête de la page vous aurez l'explication générale concernant ce type d'effet. Sur cette page vous aurez d'autres exemples de ce même effet dans d'autres oeuvres d'art, et pour sa bonne compréhension un lien vous permettra d'accéder à l'analyse détaillée dont il est issu. Si vous souhaitez accéder à cette analyse sans quitter la page de la bibliothèque : clic droit de la souris.
Par ailleurs, si vous voulez retrouver l'explication des notions analytiques et synthétiques, vous pouvez utiliser : ce lien.

On commence avec le premier effet que l'on vient de souligner et qui peut lui-même être abordé sous plusieurs angles puisqu'il recouvre :
    - une expression analytique de type a15p7
    - une autre expression analytique de type a6p7



La façon de grouper les bonhommes tous ensemble

petite  grande  Si on considère les bonhommes tous ensembles, on voit qu'ils se rassemblent en paquet compact en s'agglomérant le plus possible les uns aux autres, tandis qu'ils restent nettement séparés par des vides entre eux, même lorsqu'ils sont presque à se toucher.

Il s'agit d'une expression analytique de type a11p7



Autres effets

petite  grande  Autres expressions dans cette oeuvre du paradoxe rassembler / séparer :
    - expression analytique de type a15p7
    - expression analytique de type a1p7
    - expression analytique de type a4p7
    - expression analytique de type a13p7
    - expression synthétique de type s13p7
    - expression synthétique de type s11p7




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Le second effet paradoxal : synchronisé / incommensurable


Le dessin des silhouettes et leur rythme de croissance

petite  grande  L'incommensurabilité s'exprime souvent par des courbes de sens contraires, car notre perception ne peut pas saisir les deux courbes en même temps : nous devons cesser de courber imaginairement notre corps dans un sens pour le courber imaginairement dans l'autre sens afin de saisir la seconde, ce qui ne permet pas de garder en nous la claire perception de l'une pour y confronter commodément l'évolution de l'autre.
Cela vaut en général pour les formes creuses opposées aux formes convexes, mais cela vaut aussi, comme dans cet exemple, aux formes qui sont tournées dos à dos : la courbe faite par les bras qui se lèvent doit être abandonnée pour percevoir la courbe des jambes qui descendent. Pourtant, malgré l'impossibilité de saisir ensemble ces deux U inverses dans notre perception, on saisit bien que ces deux branches construisent clairement ensemble le signe visuel cohérent d'un même personnage, et qu'en outre elles se synchronisent pour aller exactement chacune dans leur sens à la même vitesse afin de former ensemble une figure bien équilibrée par la symétrie.

Il s'agit d'une expression synthétique de type s12p8


petite  grande  Mais plus que la coordination symétrique du U des bras et du U inverse des jambes, ce qui frappe ici c'est le rythme d'évolution des segments qui forment chaque partie de membres : bien qu'ils s'égaillent en partant dans toutes les directions et perdent le contact les uns avec les autres, ils continuent à se tracer tous de la même longueur : la longueur du trait des avant-bras est la même que celui des épaules, la même que celui des cuisses, la même aussi que celui des tibias, et la même également que celui du tronc. Tous ces traits continuent donc de s'arrêter après la même longueur de parcours, ce qui signifie qu'ils se tracent puis s'arrêtent au même rythme, bref, qu'ils restent synchronisés.

Il s'agit d'une expression synthétique de type s9p8


 
La juxtaposition de personnages tête bêche

petite  grande  Les différents personnages sont positionnés tête-bêche, de telle sorte que pour lire les uns on doit situer le sol en bas de l'image, tandis que pour lire les autres il faut au contraire lire l'image à l'envers et supposer que le sol est en haut. Un tel changement du sens de lecture du dessin nous interdit de lire en même temps (notion d'incommensurabilité) les personnages tête en haut et les personnages tête en bas, et bien que l'on ne puisse pas les lire en même temps on voit bien qu'ils se coordonnent parfaitement (notion de synchronisme) pour s'intercaler de façon régulière et pour former ensemble un groupe à l'aspect cohérent.
La régularité de la trame d'ensemble que forment les personnages est d'autant plus étonnante que, non seulement ils ne sont pas dessinés dans le même sens, mais en outre ils sont dessinés à des échelles très différentes (de grands personnages s'intercalent entre des personnages manifestement dessinés à plus petite échelle), et certains sont complètement isolés au centre d'un vide, "flottant" sans aucune attache aux personnages voisins.

petite  grande  Vers la gauche de l'image, certains personnages combinent en eux-mêmes les deux aspects du paradoxe, puisqu'ils sont "à deux sens", c'est-à-dire que la vision du personnage tête en bas, impossible à visualiser en même temps que celle du même personnage tête en haut, se synchronise pourtant avec elle sur un même graphisme.

Ces différents effets de combinaison de personnages tête-bêche recouvrent :
    - une expression analytique de type a3p8
    - une autre expression analytique de type a10p8
    - une expression synthétique de type s6p8




symbole
Le troisième effet paradoxal : continu / coupé


Le dessin des silhouettes

petite  grande  Les bras et les jambes forment des traits continus qui sont coupés par le trait qui part de la tête au sexe pour faire le tronc. Inversement, ce dernier trait est lui-même continu, bien que coupé par ceux des bras et des jambes.

Il s'agit d'une expression analytique de type a10p9



L'allure d'ensemble du groupe

petite  grande  L'ensemble du groupe de personnages schématique se perçoit comme une trame continue qui répand son réseau sur toute la surface. Dans le même temps, les personnages ou les assemblages de quelques personnages y apparaissent comme des îlots coupés les uns des autres.
Ce réseau de segments orthogonaux tisse comme une toile qui serait déchirée par l'usure, dont on se rendrait compte que tous les morceaux séparés étaient auparavant rassemblés en continu.

Il s'agit aussi d'une expression analytique de type a10p9



Autres effets

petite  grande  Autres expressions dans cette oeuvre du paradoxe continu / coupé :
    - expression analytique de type a6p9
    - expression synthétique de type s14p9
    - expression analytique de type a2p9
    - expression synthétique de type s1p9
    - expression synthétique de type s11p9
    - expression synthétique de type s8p9

Sous la partie analysée, la gravure se poursuit par des représentations de personnages semblables, mais qui cette fois ne sont  nulle part reliés par un trait continu.
Dans cette partie, ce paradoxe s'exprime spécialement par :
    - une expression synthétique de type s11p9




symbole
Le nouveau quatrième effet paradoxal : lié / indépendant

Puisqu'il est nouveau, présentons le.
En présentant la Vénus de Lespugue, on a donné le "truc" qui permet de deviner à quel phénomène physique il correspond : il suffit de chercher à savoir ce que deviennent les tourbillons spiralants accrochés à la queue leu leu dans une allée de Von Karman lorsque le différentiel des vitesses dans le fluide augmente encore.
Cette figure d'allée tourbillonnaire est obtenue lorsque l'on force un tourbillon qui se forme en spirale, à se diviser en spirales multiples qui s'épuisent l'une derrière l'autre. Avec ce type d'allée tourbillonnaire, nous disposons d'une chaîne interminable où chaque maillon spiralant s'appuie sur la dynamique du précédent et épaule la dynamique du suivant.
Si nous augmentons encore le différentiel de vitesse, nous allons tout simplement accuser le processus en cours, c'est-à-dire que nous allons aggraver la coupure entre les spirales. Finalement, l'aggravation de cette coupure va forcer chaque spirale à se refermer sur elle-même, et elle va les isoler tellement les unes des autres que la solidité de la structure commune disparaîtra.
À terme, les spirales vont en venir à tourner complètement sur elles-mêmes, ce qui leur fera perdre leur allure spiralante pour les transformer en de simples disques qui tournent en rond. Plus le différentiel de vitesse à absorber sera important, plus les tourbillons fonctionneront coupés les uns des autres, et plus leur structure d'ensemble perdra son caractère linéaire, pour se transformer en un magma informe dans lequel ces disques tourbillonnants apparaîtront comme autant de noyaux isolés.
Pour illustrer cette métamorphose des tourbillons spiralant associés en bandes, en des tourbillons ronds et tournant isolément, nous donnons une reproduction de deux simulations numériques.  Elles sont toutes les deux tirées d'un ouvrage de Marcel Lesieur intitulé "La turbulence" [Presses Universitaires de Grenoble - 1994].
La première image est la simulation des tourbillons qui se forment dans l'air à l'entrée d'un réacteur : les tourbillons continuent encore à s'enchaîner dans des spirales qui se dessinent entre l'un et l'autre, mais leur noyau est déjà un disque autonome qui tourne sur lui-même [d'après un cliché E. David, LEGI-Dassault].
Dans la seconde image la structure commune a presque complètement disparue, et seules des amorces de spirales servent encore à chaque noyau isolé pour échanger son fluide avec les autres [d'après un cliché M. Farge, Paris].

L'important à noter, est que ces noyaux qui fonctionnent comme des mécanismes indépendants, pour autant ne vivent pas en autarcie. Si par exemple on mettait un colorant dans une partie de ce fluide, on le verrait se répandre partout, rentrer et sortir de chaque tourbillon et se mélanger de plus en plus à l'ensemble.
L'allure caractéristique de cette dynamique est donc qu'il s'agit d'organisations nettement séparées les unes des autres, mais qui continuent à vivre en échange constant les unes avec les autres. Contrairement à ce qui se passait dans une allée de von Karman, ils ne s'associent cependant plus pour créer une structure commune à grande échelle, chaque tourbillon ayant acquis son indépendance, son autonomie à l'intérieur de la dynamique d'ensemble.
Cela fonctionne donc maintenant par îlots indépendants liés dynamiquement à leur environnement, et nous tenons là notre nouveau paradoxe : les tourbillons sont liés entre eux par le fluide qui les sépare et par lequel ils se régulent mutuellement, mais par ailleurs ils sont parfaitement isolés et indépendants les uns des autres. Ils sont par conséquent liés / indépendants.


Nous faisons donc maintenant retour au roc du Val Camonica pour y lire des effets paradoxaux de cette nature.

Le dessin de chaque silhouette

petite  grande  Dans chaque personnage les bras partent dans une direction complètement opposée à celle que prennent les jambes. Les bras et les jambes manifestent donc ainsi la plus totale indépendance, alors que dans le même temps le trait du tronc les lie parfaitement ensemble afin qu'ils ne se détachent pas.

Il s'agit d'une expression synthétique de type s4p10


La façon de relier les silhouettes

petite  grande  La façon dont les personnages se relient les uns aux autres a nécessairement à voir avec ce paradoxe :

          -  certains (tels sur ce croquis, les deux personnages de droite) sont reliés par un trait qui passe en continu de l'un à l'autre, et ils affirment leur indépendance parce qu'ils sont suffisamment éloignés l'un de l'autre, ou suffisamment isolés.

Il s'agit d'une expression synthétique de type s15p10

         -  d'autres (sur ce croquis, les deux personnages en noir) sont liés par adhérence, c'est-à-dire qu'ils s'accolent presque l'un l'autre, mais un vide reste à les séparer pour marquer leur indépendance ainsi préservée.

Il s'agit d'une expression analytique de type a2p10



Autres effets

petite  grande  Autres expressions dans cette oeuvre du paradoxe lié / indépendant :
On a déjà signalé que, sous la partie analysée, la gravure se poursuit par des représentations de personnages semblables, mais qui cette fois ne sont  nulle part reliés par un trait continu.
Dans cette partie, ce paradoxe s'exprime spécialement par :
    - une expression synthétique de type s11p10

Et le contraste entre la partie haute de la gravure où les personnages sont le plus souvent reliés par un trait continu, et la partie inférieure où ils sont complètement isolés les uns des autres, correspond à :
    - une expression analytique de type a7p10




Avant de quitter le Val Camonica

Si vous souhaitez imprimer ce texte, vous pouvez utiliser ce lien qui s'ouvre dans une autre fenêtre pour une présentation dans laquelle les images sont intégrées dans le corps même du texte au lieu de s'ouvrir dans un cadre séparé.

Dernière mise à jour : le 26 février 2005

 
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